Base de données et droits du producteur

Cass. civ. 1ère, 12 novembre 2015, pourvoi n°14-14.501

La protection conférée au producteur d’une base de données par l’article L.341-1 du Code de la propriété intellectuelle suppose de rapporter la preuve d’investissements spécifiques liés à la création de la base.

Ce qu’il faut retenir : La protection conférée au producteur d’une base de données par l’article L.341-1 du Code de la propriété intellectuelle suppose de rapporter la preuve d’investissements spécifiques liés à la création de la base.

Pour approfondir : L’article L.341-1 du Code de la propriété intellectuelle (CPI) confère au producteur d’une base de données une protection spécifique prévue en ces termes : « Le producteur d’une base de données, entendu comme la personne qui prend l’initiative et le risque des investissements correspondants, bénéficie d’une protection du contenu de la base lorsque la constitution, la vérification ou la présentation de celui-ci atteste d’un investissement financier, matériel ou humain substantiel. Cette protection est indépendante et s’exerce sans préjudice de celles résultant du droit d’auteur ou d’un autre droit sur la base de données ou un de ses éléments constitutifs ».

Forme de consécration législative du parasitisme, le droit propre conféré au producteur suppose que ce dernier ait engagé des investissements qui méritent d’être « protégés » par la reconnaissance d’un droit privatif.

Dans cette affaire, la société exploitant le site internet « seloger.com » reprochait à une société de procéder à l’extraction de la totalité de sa base de données constituée d’annonces immobilières pour alimenter sa propre base. Son action était fondée sur l’atteinte portée à ses droits de producteur et sur la concurrence parasitaire.

Sur le fondement du parasitisme économique, il était fait grief à l’exploitant d’un moteur de recherche dédié de détourner l’activité d’un service en ligne présentant des annonces immobilières en mettant à la disposition des internautes le contenu de ces annonces immobilières et en leur offrant la possibilité de les explorer en temps réel ce qui lui permet de capter les revenus liés à l’activité de l’opérateur de ce service.

La Cour d’appel a écarté le grief de parasitisme ; selon les juges la faute n’était pas caractérisée dans la mesure où le moteur de recherche ne faisait pas apparaître les coordonnées du vendeur ou de son mandataire sur la page de résultats, les internautes étant dirigés sur le site « seloger.com ».

Sur le fondement de la violation des droits du producteur d’une base de données de l’article L.341-1 du CPI, la Cour de cassation casse l’arrêt qui, selon elle, ne comporte pas une motivation satisfaisante. En effet, les juges du droit reprochent à la Cour d’appel d’avoir statué comme elle l’a fait par un motif qui ne permet pas de définir si : (i) les investissements liés à la collecte des données et à leur diffusion, telles que recueillies, relevaient de la création des éléments constitutifs du contenu de la base et ne devaient donc pas être pris en considération, ou (ii) s’ils faisaient partie des investissements « spécifiques » dont il fallait rapporter la preuve pour justifier de la protection.

A rapprocher : article L.341-1 du Code de la propriété intellectuelle

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